Si vous cherchez Eric Dargent, vous ne le trouverez jamais bien loin de l’eau. Ce martégal de 44 ans, aussi surnommé le surfeur d’argent, n’est pas un homme comme les autres. Il nous donne rendez-vous chez lui, dans le quartier de Lavéra à Martigues pour nous raconter son histoire.
Cheveux ébouriffés et sourire aux lèvres, il nous ouvre ses portes avec entrain. La grande baie vitrée nous offre une vue panoramique sur la baie de Martigues et une planche de surf adossée au mur décore le salon : on comprend vite chez qui on se trouve.
Ayant grandi au bord de la grande bleue, Éric est un enfant de la mer. Très vite, il découvre le surf et se met à glisser sur les vagues de la Méditerranée. Sa passion grandit et l’emmène à quitter le bercail pour aller découvrir de nouvelles vagues à l’autre bout du monde, en plein cœur de l’Océan Indien. En février 2011, son destin va basculer : alors qu’il surfe au large des côtes de l’île de La Réunion, il est attaqué par un requin qui va lui sectionner la jambe gauche. Mais cet homme au mental d’acier ne va pas se laisser abattre et ne jamais lâcher son objectif : remonter sur une planche de surf.
"Mon accident m'a donné la rage de vivre"
Après son amputation, de nombreux spécialistes lui annoncent qu’il ne pourra plus faire de surf. Pour lui, c’est impensable : « au moment-même de mon accident, je ne voyais pas autre chose que de continuer à surfer. C’est mon équilibre, je suis né avec et je ne me voyais pas continuer sans ». Alors, il a pris ça comme un challenge et s’est mis à chercher par tous les moyens une solution pour retourner glisser sur les vagues. Éric le savait, sa pratique ne serait forcément pas comme avant, mais son envie de surfer à nouveau débout était plus forte : « même avec un bout de bois, je me disais que j’y arriverai ». Son objectif, c’est de remonter sur une planche, mais surtout de partager ça au plus grand nombre : il veut montrer que malgré le handicap, rien n’est impossible.
Éric va alors se lancer dans le défi fou de la création d’une prothèse adaptée au surf. Tout va commencer lors d’un évènement organisé par son école de surf Lou Martegue peu après son accident. Valides et non-valides étaient réunis par l’amour du sport de glisse. « Ce jour-là, j’ai senti cette énergie d’être ensemble et d’entraide, qui pourrait me permettre d’avancer et d’aller plus loin ». C’est à partir de là qu’Éric va commencer à trouver des petits financeurs, des bénévoles et un prothésiste prêts à se lancer dans l’aventure. Avec un ami, il va commencer à bricoler des prototypes en collaboration avec l’école d’usinage mécanique de Salon-de-Provence qui va les aider dans leur projet. C’est le surfeur lui-même qui se jette à l’eau pour tester chacun des prototypes. A force d’essais et d’abnégation pendant 3 ans, notre surfeur d’argent va finir par trouver le système idéal d’une prothèse adaptée à la pratique du surf. Comme une bonne nouvelle n’arrive jamais seule, Protéor, une entreprise française de prothèses, devient partenaire et finalise la technologie du genou (qui est aujourd’hui commercialisée) pour une pratique optimale du sport de glisse.
"Quand je suis dans l'eau, j'oublie mon handicap"
Déjà prof dans son école de surf, c’est l’envie de transmettre sa passion qui le fait vibrer. Son parcours hors-normes le pousse donc à créer son association baptisée Surfeurs Dargent qui vise à promouvoir, créer et adapter des prothèses performantes pour les sports de glisse. A travers des cours d’initiation et des évènements aux 4 coins de l’Hexagone, il fait découvrir aux personnes handicapées le surf grâce à la prothèse qu’il a imaginée. « Le but est de montrer que malgré le handicap, on est capables de faire beaucoup de choses. On éclate les barrières du handicap grâce au sport ». A son image, ce sont ces valeurs de partage, de passion et de dépassement de soi que le sportif veut diffuser grâce à Surfeurs Dargent.
Affublé des titres de champion de France, champion d’Europe ou encore vice-champion du monde à de nombreuses reprises, on n’arrête plus Éric ! Lui qui ne faisait pas de compétition avant son accident est devenu un athlète reconnu dans le monde du handisport. « La compétition, c’était surtout un moyen de communiquer, de faire connaitre l’association. Après, j’y ai rapidement pris goût, c’est aussi une sorte de revanche face à mon accident ». Mais cet hyperactif accro au sport et surmotivé ne se contente pas du surf : skate, vélo, paddle, wingfoil et randonnées : Eric compte bien s’adonner à toutes les activités avec sa prothèse et rien ne peut l’arrêter !
"Ensemble, on arrivera toujours à aller vers nos rêves"
Sa philosophie, c’est de ne jamais renoncer. « Des difficultés, lorsqu’on a un handicap, on en a. Il va falloir trouver à chaque difficulté des moyens de les diminuer, et ce qui est certain, c’est que ce plaisir et cette chance d’être en vie, rien ni personne ne peut nous l’enlever ». Son secret, c’est de toujours garder ses rêves, et d’aller vers ce qui nous fait du bien en gardant en tête que rien n’est impossible. On ne peut qu’admirer la force de détermination de ce personnage inspirant et déterminé. Une belle leçon de vie sur fond d’aventure sportive.
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