Émancipation d'une génération d'artistes
du 13 juin au 13 octobre 2018
Émancipation est une exposition réunissant une vingtaine d’artistes aux pratiques variées dans la chapelle et les jardins d’un ancien couvent à Marseille. Le commissaire d’exposition Gaël Lefeuvre a été invité par l’Atelier Juxtapoz pour sélectionner les artistes les plus influents de la scène d’art urbain et créer une expérience visuelle sur plus d’1,7 hectare de parcours. Le visiteur découvrira une exposition faisant la part belle à une génération d’artistes qui s’est émancipée de son école principale le street-art / graffiti.

BOM K CouventLevat_2018_© Gael Lefeuvre

© N.Ammirati
Du 13 juin au 13 octobre 2018, cet atypique lieu de recueillement longtemps coupé du monde, s’émancipera de sa vocation première.
De Bom-K, maitre incontesté du graffiti qui réalisera la plus monumentale de ses oeuvres à AL Crego, petit génie du motion design aux millions de vues, en passant par Amir Roti, jeune sculpteur sur marbre couronné de la mention spéciale du prix des révélations de l’art par le Palais de Tokyo et l’ADAGP cette année, la direction artistique de l’exposition Émancipation révèle la subtile frontière entre art urbain et contemporain. Les artistes invités imagineront des oeuvres originales créées in situ, des statuettes miniatures aux peintures XXL en passant par des installations visuelles ou sonores, et du motion design. Terreau d’évènements artistiques sous-estimé, Marseille accueille cette année une exposition présentant certains des artistes les plus prometteurs de la nouvelle génération et rarement réunis.

LEGZ © N.Ammirati

Marion Potoczny © N.Ammirati
Interview du commissaire d'exposition Gaël Lefeuvre
La première fois que tu as visité l’ancien couvent Levat, quel a été ton premier ressenti et comment as-tu imaginé le lieu en tant que « support » pour l’exposition EMANCIPATION ?
Je me suis rapidement senti intéressé par l’histoire du lieu, et de ce qui s’est passé ces deux-cents dernières années. Sans passer par des recherches, c’était le ressenti vis-à- vis de l’architecture du lieu et de ce qu’on m’en a dit. Ma seconde impression a été un truc du genre : « wouaw !, une expo en extérieur ... le challenge ! ».
Quelles difficultés as-tu rencontré pour concevoir l’exposition?
C’est très grand, il y a peu de structures sur lesquelles s’appuyer pour apposer des installations et des sculptures, à part les murs et les petits autels.
C’est la première fois que je me retrouve à faire une exposition d’installation en grande partie en extérieur, avec toutes les contraintes que ça comporte : le climat et toute la technique (l’installation électrique, la diffusion du son, etc.).
J’ai aussi manqué de matière quant à la mémoire du lieu. Ici, il n’y avait quasiment plus rien quand je suis arrivé. Du coup, il fallait faire quelque chose de neuf, et pas se baser uniquement sur l’histoire du lieu.

LEK & SOWAT © N.Ammirati

GERMAIN IPIN © Psymedia
Comment l’exposition a-t-elle été pensée ?
C’est venu avec le temps et c’est un processus qui se met en place avec les artistes, Juxtapoz et avec ceux qui y travaillent. La première fois, j’étais très intéressé par le côté sacré du lieu. Même si la chapelle a beaucoup influencé mon travail car c’est le dernier lieu qui reste encore sacré, je me suis dit que pour le reste du site, il n’y avait pas suffisemment de matière et de « mémoire » pour s’attacher au sujet. Le lieu est devenu un lieu de création et cela a complètement changé l’âme de l’extérieur.
Mon objectif n’étant pas de refaire vivre un couvent, j’ai envie de l’émanciper et de donner une autre âme à ce lieu qui était religieux et qui va devenir un lieu de création artistique et une nouvelle fenêtre sur le monde.
Je n’ai pas peur d’altérer l’endroit. Le fait que cet ancien couvent ai été désacralisé par les soeurs elles-mêmes me permet d’avoir une vision plus ouverte et légère, je me sens moins contraint et c’est plus facile pour intervenir.
Ce n’est pas non plus un lieu neutre, c’est un lieu de vie, on ne peut pas le saturer, ni le dénaturer. La matière première de l’exposition EMANCIPATION, sera la nature ! Nous allons révéler cet environnement, plus que le transformer. Ça va être une sorte « d’expo-rénovation ».

FEFE TALAVERA © Psymedia

Pantónio © N.Ammirati
Comment travailles-tu avec les artistes ?
J’échange d’abord autour du spot qui leur est réservé. Je leur ai attribué un espace en amont de leur venue au couvent, même si ça peut parfois changer. une fois que l’artiste est en résidence sur place. En partant de là, on réfléchit ensemble à quelque chose de cohérent avec l’ensemble de l’exposition et du lieu. C’est une réflexion commune. Je suis celui qui choisit les artistes, mais ce sont les artistes qui prennent en main la direction artistique ! Je compte beaucoup sur les artistes pour amener leur vision, plus que la mienne.
Comment les artistes ont-ils été choisis ?
En fonction de leur talent et de ce qui me semble important de montrer aujourd’hui dans l’urban art. C’est une génération d‘artistes qui m’intéresse car c’est pour moi presque une « école d’artistes ». Même si tous ces artistes ne se connaissent pas, ils se regardent, ils ont une démarche qui est assez similaire au niveau de leur prise de conscience d’un lieu avant d’intervenir. Ce sont des artistes qui ont une démarche artistique sur le long terme et non pas sur le côté virtuel de l’art aujourd’hui qui est basé sur la photo et le nombre de like. Ils ne font pas juste de la déco ! Je me retrouve entre eux, ça fait des années que je travaille avec la plupart d’entre eux, et dans ce projet je réunis ceux qui me paraissent avoir une démarche cohérente et qui correspondent au lieu.

JOAQUIN JARA WIP © Psymedia

JOAQUIN JARA © N.Ammirati
Pourquoi ce titre
Premièrement, par rapport au lieu qui était austère où tout était soumis au codes du catholicisme, car cet ancien couvent va s’émanciper vers un lieu de vie commune. En réalité, ce lieu s’est déjà émancipé avec Juxtapoz depuis plus d’un an, qui en a fait un lieu de création nécessaire à Marseille. L’émancipation du lieu existe donc déjà et va être encore plus forte avec l’intervention des artistes de l’exposition.
Émancipation, c’est aussi un titre en hommage aux artistes que j’ai choisi. Ce sont des artistes qui se sont émancipés de leurs codes : les codes du graf ti, du street- art, de la photo, de la vidéo et de la peinture classique. Des artistes comme Amir Roti par exemple, qui s’est émancipé du graffiti pour se diriger vers le marbre. Il travaille aujourd’hui la pierre comme un mur ou un train, avec l’attitude du graffiti dans ses marbres, il a complètement brisé les codes.
Comment imagines-tu le public déambuler dans les jardins ?
Je l’imagine se perdre. On va quand même orienter un peu le public en se basant sur la structure du lieu et des chemins déjà en place, mais il y aura différentes déambulations possibles, différentes intersections. J’aimerais créer une place centrale symbolique, comme la place centrale d’un village, à partir de laquelle partiraient différentes possibilités de chemins.

KNOW HOPE & COSIMA KAYE © N.Ammirati

KNOW HOPE & COSIMA KAYE @ Psymedia
Que penses-tu apporter à la scène artistique Marseille avec cette exposition ?
Les artistes choisis pour cette expo sont des artistes très suivis sur les réseaux sociaux, observés par la scène d’art urbain. J’ai envie de faire plaisir aux passionnés du milieu du graffiti à Marseille et j’espère les impressionner, en amenant des artistes qu’ils suivent probablement mais qu’ils n’ont jamais vu dans leur ville.
C’est aussi un peu un contrepied aux projets street-art qui se sont montés à Marseille, mais qui sont juste visuels et qui n’ont pas vraiment de sens par rapport au lieu dans lequel ils s’exposent. Je n’ai rien contre ses projets, j’y ai même participé mais ça ne racontent rien et ça reste de l’illustration urbaine.
Après l’exposition « Matière noire » aux puces de Marseille et plus d’une année passée à Marseille, comment analyses-tu la ville ?
C’est une super ville pour créer, il y a beaucoup d’espaces de créations mais pour les artistes de cette ville qui veulent exposer, c’est juste la catastrophe, il y a trop peu d’infrastructures ! Et le marché de l’art, c’est pire ! Si tu veux vivre de ton travail, il faut s’exporter, tu ne peux pas rester à Marseille. Par contre, pour l’art de rue et en terme de grosses peintures illégales, c’est une ville exceptionnelle. Il y a beaucoup de lieux abandonnés, c’est une ville en perpétuelle destruction et reconstruction. Pour les artistes qui aiment la rue, c’est un beau terrain de jeux, ils n’ont rien à attendre de personne et rendent la ville artistique. Il y a plus de performances visuelles en terme de graffiti à Marseille qu’à Paris.

RODOLPHE CINTORINO WIP credit @ Psymedia

RODOLPHE CINTORINO © N.Ammirati
Comment définirais-tu cette exposition ?
Visuelle, sonore, sensorielle. Ça ira du digital à la peinture classique. C’est une exposition qui se veut riche en différentes pratiques artistiques, et pas simplement axées sur l’urban art. Je viens de l’urban art, c’est ma culture, c’est mon école mais dans cette expo, je me permets d’amener des gens dont j’apprécie le travail et qui ne viennent pas de cette école là. Et au final, il y a un lien entre tout.
Je veux montrer des choses nouvelles le gif, le diaporama, le motion design. Ce ne sont pas des pratiques encore respectées, ça ne décolle pas tant que ça.
Les artistes choisis viennent d’une génération qui s’adapte à son environnement, à son monde. Et on n’est pas dans un monde qui attend des artistes mais des publicitaires, des gens qui répondent à des commandes. Aujourd’hui, les artistes qui décollent sont ceux qui font des collaborations avec des grandes marques, plus que ceux qui vont écrire une histoire.

© N.Ammirati

Amir Roti © N.Ammirati
Cette exposition réunit des artistes des deux univers urbain et contemporain. Ton avis sur ces deux scènes artistiques ?
Ce qu’on définit comme art contemporain aujourd’hui, ce qui sort de la FIAC, ce qui fait le barème aujourd’hui. ça n’existe plus. Ou juste au travers d’une génération d’acheteurs qui ont investi dans du Jeff Koons, mais ça n’intéresse pas la nouvelle génération. On sort aujourd’hui de l’art-objet et de l’art commercial. On est aujourd’hui plus dans une démarche d’art expérimental et art performance, où la performance est presque plus importante que le résultat esthétique.
Pour l’urban art, ce qui est intéressant, c’est que ce sont des artistes qui veulent raconter une histoire. Ce que ne fait plus l’art contemporain depuis des années.
Et ce qui m’intéresse également, c’est le travail de l’artiste et la sueur qui en découle, ça donne de la force à l’oeuvre, plus que l’esthétique basique que tu peux avoir avec un vidéo-projecteur et 10 assistants. Ça, tout le monde peut le faire.
Avec cette exposition, j’ai eu envie de donner une nouvelle image à l’urban art qui se situe pour moi à la frontière de l’art contemporain.
Aujourd’hui, cet art est plus proche du concept et son évolution a été très rapide. Un mec comme Borondo par exemple, qui a fait les Beaux-arts, a emmagasiné toute la culture classique pour l’amener dans la rue.
La plupart des artistes choisis ici n’ont pas un simple travail en atelier, ils s’inspirent d’une manière ou d’une autre de la rue. 80% de leur création, c’est le support, ils vont l’observer, le révéler et le mettre en valeur. C’est ce qui fait pour moi qu’un artiste cohérent dans la rue, c’est son sens de l’observation !

© N.Ammirati

Rémy Uno © N.Ammirati
Les évènements au Couvent !
L’exposition sera visible en continu aux jours et horaires d’ouverture.
Parallèlement, chaque mercredi soir de 20h à 23h et un week-end par mois, une programmation évènementielle viendra enrichir le lieu : projections, performances artistiques, conférences-débat, concerts/DJ, etc. Et un apéro tous les vendredis soirs !


Infos pratiques
Le Couvent - 52, rue Levat 13003 Marseille
Quand : Mercredi de 12h à 23h / Vendredi, samedi et dimanche de 12h à 20h / Programmation tous les mercredis de 20h à 23h
Tarif : 2 € d’adhésion pour accès illimité au site
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